Je ne sais pas trop où je vais trouver le temps, mais bon, je ne pouvais résister … Paris Fashion Week Prêt-à-Porter Automne-Hiver 2022 (oui c’est très long), me voici ! Les collections Prêt-à-Porter sont mes préférées, loin d’une Haute Couture parfois trop guindée. Liberté, Risque et Créativité sont à l’honneur, j’espère que vous vous êtes fait passer le mot mes chers créateurs ! Alors, qu’en est-il de ces deux premiers jours de Fashion Week ? Je vous propose d’aller fouiner du côté d’Off-White, Dior, Koché et Saint Laurent …
Off-White
Un défilé hommage comme on en fait peu. Tous les ingrédients étaient réunis : du beau monde, de beaux vêtements, de beaux messages. Ne cherchez pas, toute la fashion sphère était là, on and off the runway : mère et fille Gerber, en passant par les soeurs Hadid, ou encore Serena Williams et Miss Jenner. En front-row, notre chouchou Rihanna fait sensation aux côtés d’A$ap Rocky. Le gratin footballistique est également représenté avec Paul Pogba, Marco Verratti et Robert Lewandowski. Idris et Sabrina Elba sont aussi venus faire un coucou, rien que ça. De même pour Pharell Williams, Jonathan Anderson ou Olivier Rousteing. Bref, une sacrée guest-list.
La collection n’est cependant pas en reste. À la hauteur de son regretté créateur : de la poésie, du sportwear, de l’intelligence. À bord d’une sorte de capsule temporelle, V.Abloh nous emporte à travers une rétrospective entière de sa carrière. J’y décèle deux niveaux de compréhension. Ce grand Monsieur a bien évidemment joué avec ses codes artistiques : hoodies larges, robes bustiers moulantes, varsity jackets en mille façons (mon Dieu que j’aimerais en posséder une, crush ultime). Un imaginaire de l’uniforme urbain cher à son coeur, et naturellement décliné de la tête aux pieds. Ailes d’anges, chapeaux graphiques et jupons volumineux sont également de la partie. Bella est là, sans exception depuis 2017. Son parcours mode est retracé à la perfection, et non sans émotion.
Mais Abloh s’est également amusé des codes sociaux. « Question everything » était écrit sur un drapeau brandi. Qu’est-ce que j’aime cette phrase. La mode est embourbée de diktats poussiéreux, je ne vous apprends rien. Alors, évidemment qu’elle doit être remise en question. Aiguiser son esprit, pour ne pas se laisser écraser par le déterminisme, déjouer le destin. Virgil Abloh était de ceux qui ont toujours voulu ouvrir les portes. Laisser entrer la créativité et le talent sans concession. Laisser sur le pas de la porte la couleur de peau, les origines ou l’argent. Il rappelle donc ici le combat de sa vie, subtilement.
Le show débutait aussi avec les mots de Pharell Williams « Share the codes, the cheat codes (…) The more of us that learn the codes, the stronger we are« . Cette attention portée à la prose démontre ceci : OFF-WHITE n’était pas seulement une marque de mode, mais un état d’esprit, une communauté. Quelle tristesse d’avoir perdu ce Monsieur. Je m’en rends compte un peu plus tous les jours.
Dior
Ouille ouille ouille. Je regrette presque ma dernière critique, assez encourageante finalement. Maria Grazia, que se passe-t-il ? J’ai du mal à vous suivre. Cette collection ressemble à un melting-pot de germes d’idées, sans qu’aucune n’aient pris le dessus pour pleinement se développer.
Je m’explique. Cette collection s’apparente à un flou artistique. Nommée « The Next Era« , elle est censée proposer un nouveau chapitre de Dior, sous le regard d’une multitude de portraits signés Mariella Bettineschi, empruntés à l’histoire de la peinture du XVIe au XIXe siècle. Pléthore de paires d’yeux censées questionner le jugement qui a conditionné, et conditionne encore les femmes. Mais alors, quel est le rapport avec ce qu’il se passe sur le catwalk ? Inspirations futuristes, techniques, puis médiévales et antiques se suivent mais ne s’assemblent pas. Trop d’incohérence, d’approximations qui nous font perdre le cap.
Peut-on m’expliquer le lien entre le look 1, combi moulante nervurée de tubes plastifiés, le look 68, doudoune bouffante ceinturée et pantalon laqué, et le look 79, robe de gala noire toute en volupté ? Le défilé est à l’image du look 5. Ces épaulettes pourraient tout à fait être portées par Tom Brady, juchées sur un body de dentelle, jupe en tulle et chaussures supersoniques. Tout cela est surchargé et illisible, comme un fil d’Ariane qui se serait rompu quelque part. Dior est définitivement dans le brouillard.
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Koché
J’aime bien Koché. J’avoue avoir une certaine tendresse pour Christelle Kocher, une battante qui se donne vraiment du mal. Sa pugnacité ne peut que nous taper dans l’oeil à chaque collection. Et celle-ci ne déroge pas à la règle. En coulisse, la créatrice explique souhaiter proposer une parenthèse, malgré la guerre en Ukraine faisant rage : « Même si le monde est un peu sombre, nous sommes ici pour célébrer la mode, un moment de poésie et de beauté. » Pour ce défilé, Madame Kocher propose de « revisiter une certaine idée de la couture, mais aussi avec cette énergie punk et quelque chose de chaud, de confortable. » Une dualité plutôt étonnante qui fonctionne sur le catwalk.
L’inspiration punk est clairement identifiable : harnais, résille et gantelets vinyles sont de sortie. La caricature BDSM est cependant écartée grâce à un savoir-faire millimétré très couture. On retrouve aussi les fameuses tonalités chaudes et réconfortantes : des pulls épais associés à des jupes en tulle, un tricot plus fin épicé avec de la dentelle sur une robe bustier, des survêtements spongieux dans un subtil jacquard à logo. Bref, une collection éclectique avec autant de confort que d’habillé, à l’image d’une période Covid où l’on a longtemps oscillé entre jogging et mini jupe à sequins. Un ensemble cohérent et convaincant, un moment de mode apaisant : bravo Koché !
Saint Laurent
Quelle élégance ! J’enfonce une porte ouverte, mais il n’y a vraiment que Saint Laurent pour faire du Saint Laurent (sous la coupe d’Anthony Vaccarello, naturellement). Au pied de la Tour Eiffel, une ode aux noirs est proposée (parce que pour YSL, il y avait évidemment plusieurs noirs). En effet, la palette est restreinte, mais l’inspiration, elle, est explosive. Vaccarello propose une collection à quatre mains, à la croisée entre le chic parisien et le flegme belge des 90’s. Sensualité et élégance précieuse n’ont pas raté leur rendez-vous.
Look 1 : une longue robe argentée coupée en biais, habillée d’un parfait manteau noir à double boutonnage. LA Femme YSL, les mains enfoncées dans les poches, à la fois citadine et mondaine, antinomique et pourtant sublime. Le défilé pourrait s’arrêter là. Mais, on nous gâte avec 55 autres looks. C’est rare, mais je suis fan de tout. Le look 12 : un manteau noir coupé comme ce n’est pas permis, incroyablement juste, incroyablement beau. Amour pour le look 16 en transparence, nuageux et vivant. Et ces détails de bracelets accumulés en étages, c’est pile ce qu’il faut. Mention spéciale pour toutes ces fausses fourrures stupéfiantes (merci Kering), un superbe pied de nez à celles et ceux n’ayant pas encore compris que la fourrure n’a plus rien à faire sur un catwalk. Amour aussi pour le smoking final, du Saint Laurent attendu, mais toujours impeccable.
C’était espiègle mais chic, glamour mais pas cheap. La femme Saint Laurent connaît sa hauteur et en joue, c’est certain. Mais Vaccarello lui apporte une allure tout de même accessible, easy-to-wear. Une déconstruction toute en nuance qui fait indéniablement rentrer cette collection dans les grands moments de mode. En témoigne la ribambelle de stars invitées pour ne pas rater ce spectacle. Mère et fils Beckham, casting complet d’Euphoria ou encore Rossy de Palma ne me contrediront sans doute pas.
Day 1 de la PFW, on y est ! On se retrouve demain pour de nouveaux décryptages ✨
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